Jean FERRAT... et Le Havre







1930, le 26 décembre naît à Veaucresson, en Seine-et-Oise, Jean Tenenbaum

Son père est déporté et meurt à Auschwitz

Au début des années 1950, il commence à composer… Il met en musique un poème de Louis Aragon « Les yeux d’Elsa », André Claveau interprète la chanson. C’est à partir de cette interprétation que Jean Ferrat commence doucement à être connu. Il se produit dans des cabarets parisiens

1956, il commence à composer et chante dans les cabarets parisiens tels « La Rose Rouge », « Riverside »…

1958, voit la sortie de son premier 45 tours. Il prend FERRAT comme nom d’artiste. Nom qu’il choisit en rapport avec la commune « Saint-Jean Cap-Ferrat » Christine Sèvres reprend quelques unes de ses chansons, il l’épouse en 1961

1959, il sort un 45 tours sous le nom de… Noël FRANCK… mais rechante très rapidement sous le nom de FERRAT

La même année, avec « Ma môme » il commence à passer sur les radios.
« Ma môme, elle joue pas les starlettes
Elle met pas des lunettes, de soleil
Elle pose pas pour les magazines, Elle travaille en usine, à Créteil »

1961, son premier 33 tours

1962, il fait la connaissance d’Isabelle Aubret

1963, « Nuit et brouillard »
« Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers,
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés »

1964, « La montagne »
« Ils quittent un à un le pays, pour s’en aller gagner leur vie
Loin de la terre où ils sont nés. Depuis longtemps qu’ils en rêvaient
De la ville et de ses secrets, du formica et du ciné »

1965, « Potemkine »
« M’en voudrez-vous beaucoup si je vous dit un monde
Qui chante au fond de moi au bruit de l’océan
M’en voudrez-vous beaucoup si la révolte gronde
Dans ce nom que je dis au vent des quatre vents
Ma mémoire chante en sourdine Potemkine »

1965, Il met en musique Louis Aragon, avec entre autres poèmes « Que serais-je sans toi »
« Que serais-je sans toi, qui vins à ma rencontre,
Que serais-je sans toi, qu’un cœur au bois dormant.
Que cette heure arrêtée au cadran de la montre,
Que serais-je sans toi, que ce balbutiement. »

1965, le 26 mai, à l’A.B.C. situé rue 93 rue Louis-Brindeau, devient le Concorde en 1971.
Francesca Solleville – Jacques Boyer – Jean-Pierre Rampal – Dupont et Pondu – Les Sipolos
Le même jour, se produit Guy BEART, à la M.C.H. (Maison de la Culture du Havre)
Le 26 mai, le journaliste Serge CAPET écrit dans « Havre-Libre » un article « Quelques minutes avec Jean Ferrat avant son spectacle à l’ABC qui a fait, lui, salle comble » il fait l’entretien à l’issu des répétitions.
Le chanteur est reçu dans le bureau du Maire, René Cance, entouré d’Eugène Duroméa, Maurice Schléwitz, etc… « Il n’y eut pas d’allocution, mais simplement une conversation à bâtons rompus qui se déroula dans la plus grande cordialité »
Le lendemain, Serge CAPET rend compte de la soirée « A l’ABC Spectacle de qualité avec Jean Ferrat » « salle comble digne et attentive […] nous avons entendu battre votre cœur d’homme sensible […] peut-être, pouvons nous dire, que « c’est beau la vie » et « c’est toujours la première fois », nous a fait entrevoir un peu de ciel bleu dans l’existence et nous a donné l’espoir qu’elle valait la peine d’être vécue. »
Dans « Le Havre » [prédécesseur de « Le Havre-Presse »] Philippe HUET, qui deviendra l’écrivain de polar que nous connaissons, nous titre « Jean Ferrat : « J’agis comme je peux dans la mesure de mes faibles moyens… je chante ! » « C’est avant tout une voix… une voix incroyablement belle, profonde et dont le léger voile accentue encore les caressantes intonations » Huet regrette l’absence de « présence » de Ferrat, comme peuvent l’avoir Piaf, Montand, Aznavour et Brel !
Dans « Paris-Normandie » c’est Pierre JOLY qui signe l’article « Une voix chaude et tendre qui fait passer beaucoup de choses » le journaliste souligne la chaleur de sa voix et lui reproche que « les textes de Jean Ferrat font un peu trop penser parfois à des images d’Epinal sonores. On aimerait plus d’originalité, plus d’invention »

1967, le 20 avril, à l’A.B.C.
Francesca Solleville – Jacques Boyer – Sim – Jean-Paul Hubert – Yvan Labejof
Jean Ferrat est reçu dans l’après-midi au siège du « Havre-Libre »… « Au cours de cette réception, beaucoup de souvenirs de Résistance furent évoqués, puisqu’on le sait, le père de Jean Ferrat mourut à Buchenwald [le journaliste fait erreur, il s'agit d'Aushwitz] camp de la mort, où fut précisément déporté notre directeur » [Roger Mayer]
Le lendemain Serge CAPET écrit « Ferrat, comme toujours a su le prendre [le public] avec ses très belles chansons parfois amères et bouleversantes. Il a su le prendre aussi avec sa voix douce, chaude et caressante. Sa voix est si caressante d’ailleurs, que nous aurions souhaité qu’il trouve la puissance d’un Brel, pour chanter Potemkine […] en résumé ce spectacle, tout à la gloire de la chanson française, fut d’excellente qualité »
Philippe HUET « La manière de nous mettre à poil » « Jean Ferrat cogne… bien sûr « Nuit et Brouillard » « Potemkine » ne manquaient pas d’arsenic… mais, cette fois, c’est du virulent, du violent, Jean Ferrat manie l’amertume, l’ironie douloureuse avec dextérité… la forme reste remarquable, mais le fond s’exprime avec une brutalité que ne démentirait pas Brel »
Dans « Paris-Normandie » H.P. déclare « Jean Ferrat ne ménage pas une certaine société. Il se veut sans concession. Il se veut pur, simple, libre, vrai. En fait il est attachant dans sa quête de la vérité, de la beauté, du courage »

1967, voyage à Cuba… il revient avec une moustache qu’il ne quittera pas !

1967, Antraigues-sur-Volane, en Ardèche, il s'installe avec Christine Sèvres décédée le 4 novembre 1981

1969, « Ma France »

1970, le 17 et 18 février, au Théâtre de l’Hôtel-de-Ville
Christine Sèvres – Avron et Evrard – Jean-Paul Hubert
N.L. pour « Havre-Libre » « Jean Ferrat le dit avec des fleurs » « Jean Ferrat est le paysagiste de la contestation et sa belle chanson « La France », très « vieille France » le peint en pied sur fond de lumière tricolore […] son succès est le plus sain, le plus loyal qui soit. C’est le triomphe de la sincérité dans une époque qui ne l’est pas plus que les autres »
« Le Havre-Presse » P.H. « Quand Jean Ferrat manifeste » « Il pourrait ainsi chanter toute une soirée, pour le plaisir des uns et l’exaspération des autres, mais en tous les cas, pour être vraiment Ferrat ! »
Nicole Hébert dans « Paris-Normandie » a un entretien avec lui, il lui explique les difficultés et la fatigue des tournées, ses chansons anciennes et nouvelles, sa tournée prochaine au Canada…
La même journaliste fait le lendemain, l’article sur « Deux bonnes soirées sans surprise » « L’engagement de Jean Ferrat lui vaut des salles acquises d’avance. Il a si peu l’habitude de mâcher ses mots qu’il vaut mieux éviter ses récitals si on ne partage pas totalement ses idées car il ne se gêne pas pour fustiger vertement ceux qui ne sont pas dans la ligne. Par contre, ceux qui l’aiment sont heureux de trouver en lui le chantre inspiré de leur idéal »

1972, le 11 juin, à la Forêt de Montgeon, la « Fête de l’Huma »… Prix de la vignette 10 frs le jour et 8 frs en « bon de soutien » les jours précédents.
Isabelle Aubret – Jacques Boyer – Gérard Séty – François Château
Patrick FILS, pour « Havre-Libre » « Des Havrais par milliers hier pour la fête de « l’Humanité » » Très peu de mots sont consacrés à Ferrat, l’article portant presque uniquement sur le côté politique de cette journée.
« Le Havre-Presse » juste 2 photos légendées « Isabelle Aubret et Jean Ferrat, les deux vedettes du spectacle, ont su, à leur manière, conquérir un public venu les écouter en grand nombre »
« Paris-Normandie » Pierre JOLY parle de cette fête rassemblant 10.000 personnes comme d’une réunion familiale et bon enfant mélant les spectacles, divertissements et politique… « [Le public] rit gentiment quand Jean Ferrat « emboîte » sans méchanceté un député de la majorité, verse une larme sur le « Potemkine » et bisse « Aimer à perdre la raison ». Il applaudit de confiance les beaux poèmes d’Aragon « Le Fou d’Elsa », le « Roman inachevé », « Le Voyage de Hollande » ou « Les Poètes »… »

1973, il arrête les tournées

1975, « La femme est l’avenir de l’homme »
« Le poète a toujours raison, qui voit plus haut que l’horizon
Et le futur est son royaume. Face à notre génération
Je déclare avec Aragon, la femme est l’avenir de l’homme »

Il vit toujours à Antraigues…

4 films… « Le coup de grâce » de Cayrol, il en fait la chanson « Les Beaux jours »… « Vivre sa vie » de Jean-Luc Godard, on voit Ferrat devant le jude-box en train d’écouter une de ses chansons… « La Vieille dame indigne » de Aliot, il compose la chanson « On ne voit pas le temps passer »… « Un Témoin dans la ville » de Molinaro, il monte dans le métro…

Il a toujours été « compagnon de route » du Parti Communiste Français en étant très critique de l’URSS

Pierre LAURENT, entend en 1958-59 « Deux enfants au soleil » et « Ma Môme » Il a 18 ans et va depuis ce temps collectionner disques, partitions, affiches, articles de presse, tous supports de et sur Jean Ferrat.
Concernant cette passion Ferrat, un article dans la presse havraise a été consacré à Pierre LAURENT, ainsi que 2 articles « collection privée » dans des revues spécialisées. Nous avons eu le plaisir de faire ensemble, aux « Yeux d’Elsa » une « conférence » avec passages de chansons du chanteur. Nombreux public attentif !

Vous pouvez par mon intermédiaire, dans vos commentaires ou mels, me faire part de vos souvenirs ou documents, je transmettrai bien entendu à Pierre !

J’avais passé un « appel » sur Facebook…
« HELP ! Pour mon blog "Voyage au bout de la ville... Le Havre" je recherche tous docs sur JEAN FERRAT ET LE HAVRE ! Venu 4 fois dans notre ville... en 1965 et 67 à l'A.B.C. en 1970 au Théâtre de l'Hôtel-de-ville... puis une dernière fois en 1972 à la Fête de l'Humanité à la Forêt de Montgeon. Avez-vous souvenirs, photos... »
M.E. 18 ans « jean Ferrat un très grand chanteur avec de très beau texte. »
Q.D. 18 ans « Qui en ont bercé plus d'un ! Les années 60/70... sont intemporelles... »
D.P. 61 ans « J'ai du assister à son tour de chant à la fête de l'huma. J'étais navré de l'entendre chanter "Ouh Ouh, méfions nous, les flics sont partout ! (ce n'est pas sa meilleure chanson) pour procéder à une dénonciation du "gauchisme". Il était alors très aligné sur le parti communiste. »
P.M. 43 ans « J'avais une tante […] qui adorait Jean Ferrat que mes parents de droite centriste qualifiaient de "rouge"!!!! Tu vois l'ambiance familiale..... »

Mardi 16 février 2010

11 commentaires:

GL a dit…

Bravo pour cette retrospective d'un chanteur dont la voix et le style et le rythme ne laissent pas indifférent.

DAN a dit…

Bonjour Laurent.
Ce chanteur m'a "accompagné" durant mes premières années de travail. L'une d'elle, plus particulièrement, puisque j'ai voulu en savoir plus à la suite de son écoute, je veux parler de nuit et brouillard, dont les paroles sont encore présentent dans ma mémoire :
"Je twisterais les mots s'il fallait les twister pour q'un jour les enfants sachent qui vous étiez... "
dire ça à une époque où tous les jeunes ne juraient que par les yéyé, c'était très fort !

Unknown a dit…

Je ne savais même pas qu'il était apparu dans des films. Comme toujours ton article est intéressant et tu as su exploiter à fond la documentation trouvée.

Gersende a dit…

Mais où est donc mort le père de Jean Ferrat ? Auschwitz ou Buchenwald ?

La question est ouverte !

Bonne recherche !

phyll a dit…

Salut Laurent,
merci pour cette superbe bio de ce très grand chanteur que j'ai souvent entendu à la maison, car c'était un des chanteurs préférés de mon Papa !!

Laurent a dit…

Merci à vous ! Il a "bercé" mon enfance et adolescence grâce à mon père qui l'appréciait !
Gersende a raison dans mon article il y a une faute d'inattention de ma part ! à Auschwitz ou Buchenwald est décédé le père de Ferrat ? C'est bien à Auschwitz ! Buchenwald est le camp cité dans l'article lorsque Ferrat visite la rédaction du "Havre-Libre" mais ce n'est pas le bon !
J'aurai dû relire plus attentivement ! Gersende à "coincé" son père et j'en suis fier !

Christophe a dit…

Merci LAurent de nous retracer les passages au HAvre de ce grand chanteur qui vient de nous quitter...

"Ce soir j'aime la marine ... Potemkine !"

marcopolo76 a dit…

Riche documentation ...une voix qui a su chanter ARAGON !
J'ai toute ces compilations !
Marco

Yllen a dit…

En ce 13 mars 2010, jour où nous apprenons sa mort, ton reportage Laurent fait figure d'hommage à ce grand chanteur.

phyll a dit…

le hasard de la vie a fait que ton hommage lui soit rendu de son vivant !!...au revoir, Jean ...

brigitte chicot a dit…

Cher Laurent
Merci pour la bio sur Ferrat que j'appréçiais beaucoup pour ses textes et sa musique
Bisou Brigitte